La Division nationale de lutte contre le trafic de migrants et les pratiques assimilées (Dnlt) a frappé au cœur d’un réseau d’escroquerie et de traite de personnes, dont les agissements font écho à la tragique affaire du jeune footballeur sénégalais Cheikh Touré, piégé et tué au Ghana. Selon les révélations de « Libération », la Dnlt a déféré au parquet, vendredi dernier, Libasse Niang et Oré Niang. Les deux suspects sont poursuivis pour « complicité de traite de personne, escroquerie et association de malfaiteurs ».
L’enquête a démarré le 20 octobre dernier suite à la plainte d’Aboubakry Sy. Selon ses déclarations, il a été initialement appâté par Oré Niang, qui lui a fait croire qu’elle se trouvait en Allemagne dans des conditions de vie favorables, grâce à un voyage organisé par son frère, Libasse Niang. Sous ce prétexte, le duo lui a proposé de l’aider à entreprendre le même voyage vers l’Europe en échange de 2 800 000 FCFA, somme qu’il a partiellement versée.
Suivant leurs instructions, M. Sy s’est rendu au Ghana pour y rencontrer un prétendu contact burkinabè, censé lui fournir les documents nécessaires à la poursuite de son périple. Une fois arrivé sur place, le plaignant a découvert la supercherie : il ne s’agissait pas d’un projet de migration, mais d’un réseau frauduleux de type Qnet, impliquant plusieurs ressortissants ouest-africains. Après plusieurs jours de rétention et de manipulation, Aboubakry Sy est parvenu à s’enfuir, abandonnant son passeport, et à regagner le Sénégal par voie terrestre.
De retour au pays, M. Sy a alerté sa famille et d’autres victimes potentielles. Il a notamment fourni aux enquêteurs des informations précises ainsi qu’un message vocal où Oré Niang reconnaissait leurs activités criminelles. Aboubakry Sy a également informé les autorités que les mis en cause tentaient de rentrer au Sénégal via le Mali, paniqués par la médiatisation du décès du jeune footballeur sénégalais Cheikh Touré au Ghana.
Sans délai, la Dnlt a émis une « opposition », permettant l’interpellation de Libasse Niang et Oré Niang au poste de contrôle frontalier de Kidira. Au cours de son audition, Libasse Niang a reconnu les faits. Il a confirmé que sa sœur, Oré Niang, avait d’abord contacté Aboubakry Sy en simulant leur présence en Allemagne. Il est ensuite intervenu pour le convaincre, avant d’organiser son départ pour le Ghana. Après que la victime a découvert la supercherie, Libasse Niang a tenté de l’intégrer à leur réseau criminel, lequel recrutait des candidats avec de fausses promesses d’opportunités à l’étranger, moyennant une commission de 100 euros, majorée de bonus pour chaque nouvelle recrue.
Libasse Niang, qui affirmait avoir cru à un système légal d’enrichissement rapide, a reconnu avoir recruté cinq personnes, dont M. Sy, et les avoir confiées à son « patron », un Burkinabè nommé Dieusongo Samadou, alias Abdoulaye Diobnaba. Il a toutefois prétendu qu’aucune violence n’avait été exercée sur les recrues. De son côté, Oré Niang a nié les accusations directes d’Aboubakry Sy. Elle a soutenu avoir été elle-même enrôlée dans le réseau par son frère. Elle a déclaré qu’une fois arrivée au Ghana, elle avait réalisé qu’ils étaient victimes d’un réseau Qnet, les forçant à user de subterfuges pour appâter des proches dans cette entreprise frauduleuse.
Concernant Cheikh Touré, les suspects ont prétendu ne l’avoir jamais connu, tout en soulignant que de nombreux étrangers, notamment des Sénégalais, sont piégés par ces réseaux criminels opérant au Ghana.
Pressafrik
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