Tivaouane : une veille de rentrée des classes morose pour les vendeurs de matériel scolaire
À la veille de la rentrée des classes pour les élèves, prévue ce mercredi 8 octobre, le marché central de Tivaouane offre un contraste saisissant, avec des étals bien garnis de fournitures scolaires, mais des acheteurs qui se font rares, signe des difficultés économiques que vivent de nombreux ménages sénégalais.
En cette période pré-rentrée scolaire où les activités commerciales sont d’habitude intenses sur le marché local, l’ambiance est morose. Cahiers neufs, stylos colorés et manuels empilés attendent preneurs. Les parents d’élèves, d’habitude nombreux à faire leurs emplettes en ce début du mois d’octobre, se montrent particulièrement discrets cette année.
“Nous avons tout préparé pour la rentrée, mais les parents n’achètent presque rien. Ils demandent les prix, puis repartent. Ils n’ont pas les moyens”, se dséole Moussa Diop Mbaye, commerçant de renom au marché central.
Devant sa boutique, sont exposées des piles de cahiers et de sacs d’écolier.
La situation est identique chez Aïssatou Ndiaye, installée à l’entrée du marché.
Elle se souvient de pré-rentrées scolaires où elle travaillait sans relâche jusque tard dans la nuit.
“En cette période, je ne m’asseyais presque pas. Aujourd’hui, je passe plus de temps à attendre qu’à vendre. Les priorités ont changé : les parents veulent d’abord remplir les marmites avant de penser aux fournitures”, confie-t-elle, résignée.
La cherté des prix des produits de première nécessité a obligé de nombreuses familles à hiérarchiser leurs dépenses. L’achat de matériel scolaire est souvent étalé sur plusieurs semaines, voire différé, en attendant le paiement des salaires ou la réception d’aides ponctuelles.
Pouvoir d’achat en berne et stratégies d’adaptation
Dans plusieurs ménages, les enfants eux-mêmes participent désormais aux dépenses liées à la rentrée. Amadou Ba, élève en classe de 3-ème, vend des stylos et des gommes dans la rue, pour avoir de quoi acheter ses cahiers.
“Ce que je gagne suffit à payer mes fournitures et à aider mes petits frères. Ce n’est pas facile, mais je n’ai pas le choix”, explique-t-il avec détermination.
Les commerçants notent aussi un phénomène croissant de la réutilisation des anciennes fournitures. Les sacs sont rafistolés, les ardoises rénovées, et manuels échangés entre voisins ou proches parents.
La solidarité familiale et communautaire est mise en branle pour atténuer les temps durs.
Cette morosité commerciale touche de plein fouet les jeunes marchands ambulants, nombreux à avoir contracté des crédits pour anticiper une forte demande.
“J’ai emprunté 150.000 F CFA pour acheter des stylos, ardoises et cartables. Si je ne vends pas maintenant, je ne sais pas comment rembourser”, s’inquiète Awa Camara, une jeune vendeuse installée au bord de la route menant à la gare routière.
Mamadou Diop, vendeur de sacs et de cahiers depuis plus d’une décennie, observe avec désolation une situation inédite, à ses yeux.
“D’habitude, à pareille période, les clients se bousculent devant les boutiques. Cette année, c’est le calme plat”, dit-il, en arrangeant ses marchandises, de façon machinale.
Les commerçants interrogés appellent les autorités locales et étatiques à mettre en place des mesures d’accompagnement urgentes, comme des allègements fiscaux, des facilités d’installation et de sécurisation de leurs espaces de vente. Pour eux, la période de la rentrée scolaire constitue un véritable “bouffée d’oxygène” dont la compression risque d’avoir des effets en cascade sur leurs activités.
À Tivaouane où la rentrée scolaire constitue, bien plus qu’un simple événement pédagogique, mais un moment charnière qui redynamise les petits commerces et l’économie locale, la morosité ambiante de cette année fait craindre une saison déficitaire et suscite les inquiétudes d’acteurs économiques déjà fragilisés.
La rentrée scolaire 2025-2026 intervient dans un contexte économique particulièrement tendu, où l’équilibre budgétaire des ménages est mis à rude épreuve.
Entre les dépenses alimentaires et charges scolaires, beaucoup doivent faire des choix difficiles, révélant l’ampleur des défis économiques auxquels font face les familles sénégalaises.
APS
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